25 mars 2016

L'Amphithéâtre de la procrastination

Individus n°1 : Pouffus Bobo Macadamius
Description: Classe Moyenne ou supérieure. Toujours bien sapées. Se déplacent généralement en gang, Iphone 18 à diamants incrustés en main. Situées au fond de l'Amphi à discuter du dernier son de Kendji Girac.
Quartier général: Coffee shop à la mode /kebab du coin.




Individus n°2: Hippies-Raegaeton Militantis
Description: Classe populaire. Goût pour les blocus et la révolte. Considèrent la pause-clope comme institution sacrée et lieu de socialisation. Quasi-inexistants en amphithéâtre sauf au 1er cours, pour faire genre. 
Quartier général: Soirées Apéro-Vodka/ Sous les ponts



Individus n°3: Elitaeus Adonis Déchiretouxe
Description: Bilingues. Meilleures notes de la promo. Prennent des cours de Philo par correspondance. Effectif plus ou moins réduit en fonction de la filière. Ont toujours une question à poser incompréhensible et sans intérêt pour la majorité des individus.
Quartier général: Café intellectuel/ bibliothèque





Individus n°4: Homo fainéantis
Description: Position dans l'amphi aléatoire, en fonction de sa motivation à suivre. A porté le même pull-over ces trois derniers mois. Fréquence de soupir d'ennui: 3 à 4 fois par heure. Avenir incertain. Se demande ce qu'elle fout là.
Quartier général: Son lit



‘’Cher lecteur,

La fac, c'est comme une grande mare aux canards.
Les plus petits, sans repères, suivent les plus influents, les moins compétents se noient et les plus solitaires s'isolent. Certains parviennent à trouver leur voie, tandis que d'autres errent sans savoir vraiment où aller.
Puis, dans cette mare, il y a moi.

Je n'ai jamais rencontré autant de désillusions qu'à la fac. En amitié, pour commencer.
Le concept d'amitié à la fac est, pour moi, quelque chose de très éphémère. En deux années j'ai rencontré autant d'olibrius que je n'ai de poils sur les jambes. C'est à dire beaucoup.
De l'énergumène sans cerveau qui n'effectue que deux lignes sur un dossier de 10 pages à la bourgeoise pré-adolescente qui te regarde de travers du jour au lendemain ; des conversations insipides à l’abécédaire des copinages sans intérêts, la fac est un tissu plus ou moins foireux de relations sociales que tu dois soit intégrer, soit supporter. C’est un peu comme à la roulette russe : avec un peu de chance, on peut espérer s'enrichir culturellement et rencontrer des gens qui nous pousseront vers le haut. Ou pas.
Dans ce florilège d'individus, deux points nous réunissent: la précarité ambiante et notre attachement à réviser la veille au soir des partiels. Ou le matin même, selon le taux de flemme.

Parlons aussi de l’ennui chronique et de l’illusion d’avoir le choix, sans savoir parfois où l’on va. Parlons du manque d’informations, de l’administration parfois affligeante, et des professeurs qui lisent leurs cours comme le ferait un collégien à son exposé de physique-chimie. Parlons du fait qu’en fac, c’est un pour tous et chacun pour sa gueule. Parlons du postulat selon lequel les années universitaires seraient les plus belles de nos vies.

Bien sûr, j'exagère. La fac, ce n’est pas si mal. Elle représente, sinon un épanouissement total, une bonne base de culture générale et d’expériences. L’apprentissage forge l’âme : moi, j’ai formé ma mémoire en ingurgitant fébrilement trente pages de cours magistraux en deux nuits; j’ai formé mon corps aux pâtes et aux courgettes en temps de crise; j’ai formé ma détermination en me levant en plein hiver pour traverser la ville à pied et aller à mon cours de 8h; j'ai formé mon cœur aux amitiés qui n'en étaient pas.

Aujourd'hui, je suis un peu perdue. Tiraillée entre l'art, la médiation, le social, la communication, puis finalement le néant, effrayée par l'idée que finalement aucune voie ne me corresponde. Perdue quant à mon insertion dans la vie professionnelle. Perdue face aux exigences des voies dans lesquelles je m'engage.

Mais je ne me plains pas (trop). Car l'accès à l'Education, lecteur, est quelque chose qui malheureusement dans certaines sociétés ne va pas de soi. S’asseoir au chaud et déclarer en avoir marre des études, c’est manquer de respect à tous ceux qui, eux, n’ont pas eu la possibilité d’en faire. Génération Z, enfants de la crise et du confort occidental, considérons que nous faisons partie des chanceux, et élevons nos esprits au-delà des difficultés passagères.
Même si des fois ça fait chier.’’


XOXO,





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